HOMÉLIE DU DEUXIÈME DIMANCHE DE CARÊME B

HOMÉLIE DU DEUXIÈME DIMANCHE DE CARÊME B

Sacrifier notre Sacrifice*
C’est par ce pléonasme, ce semblant de répétition, chers frères et sœurs, que je veux résumer le contenu de ma méditation de ce 2ème dimanche de carême année liturgique B.
Sacrifier comme vous le savez c’est offrir, perdre, abandonner quelque chose qui a plus ou moins de la valeur au profit de quelqu’un ou de quelque chose. C’est un acte généralement sacré, ou encore significatif, important, même quand il n’est pas lié à un culte ou une tradition. Voilà pourquoi l’objet d’un sacrifice peut aller jusqu’à la vie. De plus, que ce soit l’auteur, la motivation ou le destinataire du sacrifice tout permet de rendre presque toujours l’acte sacrificiel plus solennel et grave.
Chers frères et sœurs, les textes soumis à notre méditation en ce deuxième dimanche de carême de l’année liturgique B, nous invitent à méditer sur le sens du sacrifice et la transfiguration de notre Seigneur Jésus Christ.
Dans la première lecture, Dieu demande à Abraham son fidèle serviteur de lui offrir son fils unique né par miracle. A l’écoute de ce récit, une question peut automatiquement nous inquiéter : comment Dieu peut-il demander à Abraham de sacrifier son fils ? Mais à bien y voir ce texte est au contraire une condamnation formelle et ferme de tout sacrifice humain puisque Isaac n’est pas sacrifié. En effet, à cette époque les sacrifices d’enfants étaient une pratique des Cananéens : de nombreux Israélites croyaient donc qu’un tel sacrifice plaisait à Dieu. Isaac son fils était tout ce qu’Abraham avait de plus cher mais plus que ce fils, il avait Dieu en qui il croyait et avait foi. Raison pour laquelle il n’hésite pas à accepter l’offrande de son fils à Dieu ; car ce n’est que ce qu’on a plus de cher qu’on peut offrir à son Dieu. Saint Paul nous confirme d’ailleurs la cherté du sacrifice dans la deuxième lecture lorsqu’il nous explique que Dieu est désormais prêt à tout pour nous parce qu’il a déjà osé sacrifier son Fils pour nous. Ce sacrifice suprême témoigne de son amour infaillible et indéfectible pour tous les hommes. Saint Jean dans son évangile le dit si bien : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique ». Quand on aime, on donne toujours.
Abraham ne pouvait se douter donc que la volonté de Dieu ne visait pas l’immolation de son fils Isaac. Or la fin du récit nous montre bien que la volonté de Dieu était autre. C’est ainsi que Dieu intervient de façon catégorique pour arrêter Abraham dans son élan. Car ce que Dieu recherchait c’était plutôt l’affermissement de la foi du patriarche. Dieu met à l’épreuve ses amis pour que leur foi grandisse (Cf. Hébreux 12,6 et Judith 8,27). Pour réserver ses plus grands bienfaits à ses fidèles il s’assure de leur fidélité quand tout espoir leur semble perdu. Pendant toute sa vie, Abraham a compté sur les promesses de Dieu pour son fils ; mais est-il prêt maintenant à sacrifier les promesses avec son fils ? Dieu l’a placé sur un chemin, que va-t-il faire si le chemin semble se perdre ?
Ces questions résonnent aussi pour nous qui avons entamé le carême il y a plus de dix jours et qui sommes rassurés que nos privations, nos sacrifices actuels sont tellement exigeants pour nous qu’ils nous mèneront forcément à la Résurrection, à Pâques. Toutes ces résolutions que nous prenons, ces efforts, ces oblations que nous faisons sont-ils réellement ce que Dieu attend de nous ? Serons-nous prêts à prendre un autre chemin aujourd’hui même s’il nous semble sans issue ? Sommes-nous prêts à sacrifier nos sacrifices pour aboutir à ce que Dieu veut réellement ?
Frères et sœurs, il s’agit une fois de plus encore de la volonté de Dieu. Car si nous avons fait des sacrifices selon notre volonté ou notre bon plaisir il nous faut rappeler que le combat du carême doit être fait les yeux fixés sur Jésus Christ notre Seigneur. C’est pourquoi aujourd’hui encore, Dieu nous fait entendre sa volonté suprême dans l’évangile : Écouter la voix de son Fils. De la Loi représentée par Moïse et des prophètes représentés par Élie, il fait un seul et unique corpus dont le tenant est Jésus, dans cette théophanie de la transfiguration.
En effet, Jésus et ses disciples retournent sur le chemin qui le conduira par Sa Passion et Sa mort, à la Gloire de la Résurrection. Jésus est monte sur la montagne pour prier. La montagne est le lieu de la Révélation, de la présence de Dieu qui se manifeste aux hommes. Jésus est transfiguré dans sa relation à Dieu, dans sa prière. Aujourd’hui c’est nous qui sommes appelés à reconnaître en Jésus le Fils de Dieu, le bien-aimé du Père et nous avons à l’écouter, car Il nous parle et croire, c’est d’abord écouter Jésus qui nous révèle l’amour du Père pour tous les hommes, qui est la Parole de Dieu, qui s’est manifestée une fois pour toutes dans le mystère de la Passion, de la mort et de la résurrection.  Écoutons-le, Il fera de nous des fils du Père dans l’Esprit Saint.  Écoutons-le, -nous, qui sommes disciples du Christ dans son Église. Il nous appelle à être ses témoins et à vivre avec Lui. Écoutons le Christ qui nous parle dans les personnes que nous côtoyons chaque jour, et dans les événements qui nous interpellent. Écoutons-le, car c’est le Fils de notre Père. Écoutons dans la prière et dans notre vie. Lui seul peut nous transfigurer. Oui, la vie chrétienne consiste à écouter la Parole de Dieu, à la laisser résonner dans notre cœur pour qu’elle nous transforme.
Aussi, comme le psaume le chante, offrir à Dieu le sacrifice d’action de grâce et lui tenir ses promesses c’est tout ce qu’il y’a de plus vénérable et souhaitable. Cependant le faire selon ce que Dieu a prévu et non pas comme nous l’entendons, c’est ce qu’il y’a de plus glorifiant pour Dieu et pour notre salut. Parvenus à ce premier quart de notre carême le moment est donc choisi, grâce aux textes de ce jour, pour apprécier l’objectif de notre carême 2024 ; est-il tourné vers nous-mêmes ou vers Dieu ?

Père Paul KONKOBO

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