Depuis le 11e dimanche du temps de l’Église, nous lisons la partie de l’Évangile de Matthieu, où il est question de l’envoi des douze apôtres en mission. Le 12e dimanche, Jésus leur disait – et nous disait : « Ne craignez pas ceux qui tuent le corps sans pouvoir tuer l’âme ». C’était pour nous rendre forts au milieu des persécutions et des difficultés, qui ne manquent pas dans la vie d’un chrétien sous quelque forme que ce soit.
En ce 13e dimanche, à la fin du Discours de mission, Jésus promet une récompense à ceux qui lui resteront fidèles jusqu’au bout, dans leur pratique religieuse. Mais il nous donne d’abord d’autres exigences de la mission évangélique, lesquelles se résument en deux choses : 1° Il faut préférer le Christ à toute chose … ; 2° L’accueil est un signe de l’amour vrai.
1° Préférer le Christ à toute chose, à toute personne, et même à sa propre vie. Jésus le dit en une formule lapidaire dictant une exigence qui semble excessive et inhumaine : « Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi … ». Disons tout de suite que Jésus ne cherche pas par là à négliger l’amour que nous devons à nos proches. D’ailleurs dans un autre passage des Écritures (Mc 7, 11-13), il dénonce l’hypocrisie de certains pharisiens qui, sous prétexte de servir Dieu, privent leurs familles de leur héritage légitime. Ce que Jésus nous demande aujourd’hui, ce n’est donc pas de haïr, mais d’aimer nos proches, non point selon les critères des hommes qui ont toujours tendance à soupeser, à évaluer, à comparer, mais à la manière de Dieu qui aime sans condition. « Etre digne de Jésus, c’est aimer selon son amour puisqu’en lui, Dieu se révèle comme don d’amour parfait ». Aimer sans calcul, sans compter comme Jésus nous l’a enseigné pour ressembler à Dieu, c’est-à-dire du fond de nos cœurs si bien que même le plus « petit » geste charitable comme donner de l’eau à boire, devient un signe merveilleux de don de soi comme l’obole de la veuve. Voilà ce que signifie « préférer Jésus », lui donner la 1ère place dans notre vie. Une fois que Dieu est ainsi aimé par-dessus tout, tous nos autres amours obtiennent un socle solide. Unis à Jésus déjà par le baptême, par lequel nous mourons au mal pour ressusciter à une vie nouvelle (2e lecture), nous pouvons alors dire avec saint Paul : « Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi » (Ga 2, 19).
2° Être accueillant comme signe de l’amour vrai. L’amour vrai n’est pas théorique, il se vit. C’est pourquoi Jésus, lui, ramène toujours au concret et à la simplicité : « accueillir », « donner un simple verre d’eau fraîche ». Dans la 1ère lecture, nous avons un bel exemple d’accueil : la femme de Sunam qui hébergeait le prophète de Dieu. Sa vertu d’hospitalité, désintéressée, est finalement récompensée par Dieu (comme l’avait été celle d’Abraham et Sara, à Mamré) : alors qu’elle est stérile, le prophète lui annonce la naissance prochaine d’un fils.
Dans notre monde d’anonymat, d’individualisme, de tels gestes d’hospitalité, d’ouverture à autrui ne sont pas faciles. Nombreux dans nos sociétés de peur, de soupçon, d’égoïsme sont ceux qui s’enferment sur eux-mêmes. Pas de partage, pas d’attention aux autres, ni même parfois une simple salutation. Méfiance totale ! Rappelons-nous que cela est contraire à l’Évangile où Jésus nous demande aujourd’hui de lui donner la priorité dans notre vie, de prendre exemple sur lui qui est amour, un amour qui se donne et qui accueille. Les gestes par lesquels il nous demande de nous manifester comme chrétiens sont petits aux yeux des hommes, mais lorsqu’ils sont remplis d’amour, ils ont valeur d’éternité. Alors ne négligeons aucun d’eux.