« Le grand, le premier commandement »
Peuple de Dieu,
Qu’y a-t-il de plus essentiel, de plus désiré, de plus attendu dans le cœur de chaque homme que l’amour. L’amour en christianisme a pour nom charité et la charité est le résumé de tout l’évangile.
Déjà à travers l’Ancien Testament, Dieu se faisait proche de son peuple par son soutien incontournable manifesté à son égard. La Nouvelle Alliance ne fait qu’incarner cette promesse d’amour à l’image du Fils Jésus, Lui l’archétype de la réconciliation et de la miséricorde. Par amour pour nous, Dieu s’est révélé en Jésus incarné pour nous laisser percevoir son mode d’être. Pour Jésus, la première place revient à l’amour de Dieu mais ce dernier ne va pas à sens unique puisqu’il doit se manifester dans l’amour du prochain (Mt 22,36-40).
L’amour, paroxysme de la vie chrétienne
À la question du docteur de la loi : « quel est le plus grand commandement ?» (Mt 22, 36) Jésus répond : « tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, et de tout ton esprit. Voilà le grand, le premier commandement. Et le second lui est semblable : tu aimeras ton prochain comme toi-même. De ses deux commandements dépend toutes la Loi,
ainsi que les Prophètes » (Mt 22, 37-40). Ainsi seul l’amour est source et principe de la morale chrétienne. La désignation adéquate du chrétien est : celui qui aime. Toutefois il arrive qu’on se pose la question de savoir qui entre le Christ et la Charité, est la source de la morale chrétienne. Faut-il les identifier, ou faut-il les distinguer, comme deux pôles qui équilibrent un univers ? Le tout est de savoir, que ces deux préceptes sont distincts par leur objet, mais n’en font qu’un dans leur inspiration. Que ce soit l’adoration de Dieu qui exige la fidélité à sa volonté ou la dilection fraternelle qui ordonne la vie au service du prochain, c’est un unique amour qui commande la conduite du disciple, l’emporte sur l’exercice du culte et
assure la possession de la vie éternelle.
Le mystère de l’Eucharistie nous rassemble en un seul corps dans le Christ Jésus. A la lumière de saint Paul, la communion au Corps et au Sang du Christ, ne nous éloigne pas l’un de l’autre mais au contraire nous rapproche en formant une seule famille dans le Christ. Comme chrétien, notre union
au Christ passe également par la relation à autrui, car c’est pour nous tous qu’Il s’est dépouillé. La relation fraternelle dans notre vie quotidienne semble l’une des caractéristiques de l’appartenance au Christ. Celui ou celle qui embrasse la vie du Christ est invité à s’ouvrir de plus en plus envers ses
semblables en qui l’universalité de l’amour de Dieu est inscrite.
Jésus n’a-t-il pas dans ses messages et dans ses actes faire apparaître la figure du prochain que Lui a incarné ? La parabole du bon samaritain nous éclaire mieux. Elle nous montre que le prochain n’est pas uniquement les personnes de notre clan mais celui à qui je dois mon aide dans n’importe quelle circonstance et à travers un lieu donné. C’est en apportant une
réponse directe aux besoins des autres et en s’aidant mutuellement que cet exercice se concrétise.
Aimer le Christ ne se vit pas uniquement de façon verticale mais cela doit se traduire dans nos actes quotidiens, en développant notre capacité d’atteindre l’autre dans sa souffrance et l’aider à se reconstruire. Pour y arriver, cela requiert de chacun une attention particulière à l’égard de nos frères et sœurs.
D’autre part, en restant à la suite de Jean nous pouvons nous demander comment l’amour est-il possible ? Puisque Dieu est invisible. S’il est vrai qu’Il échappe à nos yeux, par quels moyens pouvons-nous manifester notre amour et notre attachement à Lui. La première lettre de Jean semble trouver une bonne formule pour nous éclairer sur ce sujet en nous
disant : « En effet celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, est incapable d’aimer Dieu, qu’il ne voit pas » (1Jn 4,20). Pour le disciple bien aimé, l’amour divin est intimement lié à l’amour du prochain. Autrement dit, c’est dans l’autre que je découvre le vrai visage de Dieu, car il continue encore de se révéler à nous. L’Amour de Dieu ne resplendira pas si chacun de nous se contente de son petit projet personnel jusqu’à exclure l’autre. Nous ne pouvons pas aimer Dieu et oublier les soucis de nos frères et sœurs qui peinent à se reconstruire. L’amour vrai se traduit dans nos actes de tous les jours, il se manifeste dans l’entraide, le partage et la communion fraternelle.
À la suite du Christ le disciple est appelé à vivre dans l’amour, et de Dieu et du prochain, dans le sens où cet amour s’est incarné et est le fondement de la relation de l’homme avec Dieu et de l’homme avec l’autre, ainsi sans lui l’homme ne peut vivre. C’est en cela que Saint Paul dit dans son hymne à l’amour ce qui suit : « j’aurais beau parler toutes les langues des hommes et des anges, si je n’ai pas la charité, s’il me manque l’amour, je ne suis qu’un cuivre qui résonne, une cymbale retentissante. (…) Ce qui demeure aujourd’hui, c’est la foi, l’espérance et la charité ; mais la plus grande des trois, c’est la charité » (1Co 13, 1-13).
Père Thomas MESIDOR