Frères et sœurs, être libre, se faire libre pour servir le Christ, tel est le message qui ressort des lectures bibliques de ce 13e dimanche du Temps Ordinaire.
Dans la deuxième lecture, c’est cette liberté que saint Paul nous rappelle quand il nous dit aujourd’hui comme jadis aux Galates : « Vous, frères, vous avez été appelés à la liberté. Mais que cette liberté ne soit pas un prétexte pour votre égoïsme ; au contraire, mettez-vous, par amour, au service les uns des autres ». Pour l’apôtre, la liberté est essentielle et fondamentale à la vie de tous. Elle est un bien remarquable à condition d’être ouverte à tous, sans restriction, ni privilège, ni renfermement sur soi. Nous nous disons souvent libres. Ce n’est pas faux. Mais comme Paul, il convient de ne pas oublier que, si au nom de sa liberté on n’en fait qu’à sa tête, on tombe dans l’égoïsme et on crée du désordre autour de soi. En nous demandant de nous mettre, par amour, au service les uns des autres, Paul sait que, pour être efficace, la liberté doit prendre appui sur la charité ; elle doit nous tourner vers les autres. Nous ne sommes pas libres pour faire tout ce que nous voudrions, mais pour aimer. Si bien que, être libre vraiment, c’est entrer dans une relation d’amour les uns pour les autres. C’est cela avoir la foi, attitude que nous réussissons à adopter si nous marchons « sous la conduite de l’Esprit Saint », pour ne pas risquer de « satisfaire les convoitises de la chair », ainsi que nous dit saint Paul pour nous inviter à être libres de la vraie liberté, celle qui oriente vers le bien.
C’est cette liberté que se donne Jésus dans l’Évangile, quand il « prend avec courage » la route de Jérusalem, ville sainte où il sait bien qu’il subira sa Passion. Il se décide donc librement d’aller au bout de sa mission malgré les souffrances et la mort. Aujourd’hui, nous qui sommes croyants, nous voulons mettre nos pas dans ses pas, à l’instar de celui qui lui a déclaré : « Je te suivrai partout où tu iras ». C’est la promesse du jour de notre baptême et de nos multiples « ainsi soit-il ». Mais écoutons sa réponse aux requêtes de ceux qui veulent le suivre : « Quiconque met la main à la charrue, puis regarde en arrière, n’est pas fait pour le Royaume de Dieu ». Ce qui veut dire : « n’est pas fait pour vivre en amitié avec Dieu ». En disant cela, Jésus est conscient de l’importance radicale et absolue de sa mission. Il ne peut donc admettre aucun atermoiement, aucun retard. De plus, ce qu’il attend de nous ses disciples qui voulons le servir, ce n’est pas peu de choses ni même beaucoup de choses, mais … tout ; ce n’est pas un engagement pour un temps, c’est un engagement pour toujours, sans regarder en arrière, pour aller jusqu’au bout.
Aujourd’hui dans la société et dans l’Église, il y a un terme qui émerge ; on l’utilise beaucoup : c’est ‘‘démission’’. Pour peu de choses, il faut démissionner : soit on est forcé à démissionner, soit on est tout le temps prêt à le faire, si les choses ne marchent pas comme on le souhaite. Devant les difficultés, Jésus, notre Maître, n’a pas démissionné, mais il est resté fidèle à son Père et ‘‘il a aimé les siens jusqu’au bout’’. A son exemple, quand nous sommes au service du Royaume de Dieu, il nous faut du courage pour aller jusqu’au bout. Pas à moitié en disant à la fois oui et non, en se laissant guider par ses intérêts égoïstes… Bien souvent, en matière de service à rendre, on reste hélas au niveau des bonnes intentions : on voudrait visiter un voisin malade, on voudrait faire du bénévolat dans son clocher, on voudrait participer à une action sociale, on voudrait consacrer un peu de temps chaque jour à la prière, au partage biblique et à la réflexion, mais on n’a jamais eu le temps de réaliser un seul de ces projets. Parce qu’il faut d’abord mes affaires personnelles, ensuite, les affaires de Dieu, auxquelles nous ne pensons que s’il nous en reste encore un peu de temps. Et finalement, au bout de la journée, on se rend compte qu’aucune minute n’a été réservée au Seigneur, par qui nous avons pourtant non seulement tout notre temps, mais la vie, le mouvement et l’être. A ce titre, notre façon de vivre, d’élaborer notre emploi de temps, de tenir nos agenda devrait être une action de grâce à Dieu, à qui nous devons tout.
Frères et sœurs, ce que Jésus nous demande aujourd’hui, c’est la liberté, une liberté tout imprégnée de l’esprit de charité. Il nous appelle à le suivre totalement et sans attendre, car le Règne de Dieu passe avant tout. N’oublions pas que son Royaume n’attend pas, et que si nous devons aider à le bâtir, quels que soient notre état de vie (laïc ou consacré), nos possibilités et notre rang social, c’est aujourd’hui. Pensons-y.
Père Basile