Frères et sœurs, nous voici, en ce temps pascal, à pèleriner, dimanche après dimanche à la rencontre du ressuscité. Aujourd’hui, c’est au bord d’un lac qu’il nous donne rendez-vous avec ses disciples. Hier c’était sur un chemin, ou dans une maison verrouillée… Mais c’est toujours lui, que les disciples ont pourtant tant de mal à reconnaitre…
Deux enseignements de premier ordre sont donc à retenir en compagnie du Christ ressuscité : le premier vaut aussi -et je dirai surtout !- pour notre vie qui nous attend après le départ de ce monde. Nous allons proclamer dans le Credo, « Je crois en la résurrection de la chair » Nous pouvons avoir du mal à imaginer cette résurrection, tant cela nous paraît éloigné de la réalité de la mort. Alors la rencontre des apôtres avec leur maître dans les jours et semaines qui suivent la résurrection sont à lire avec attention, d’autant que Jean, aujourd’hui, mais aussi Mattieu, Luc et Marc, disent tous quatre la même chose : Les apôtres ne reconnaissent pas le Christ avec lequel ils ont vécu pendant 3 ans, son physique n’était donc plus le même. Et en même temps, il se laisse toucher, et il mange même avec eux. Il apparait et disparait d’une façon incompréhensible pour un vivant.
Ce corps de ressuscité n’est donc plus de ce monde ; il n’obéit plus aux règles de la vie sur terre, qui sont inséparablement liées -et la science nous le dit- au temps, à l’espace et à la matière. Toute réalité dans ce monde est en effet prisonnière du temps et de l’espace, et n’existe que par la matière. Ce corps du ressuscité est donc en dehors de cette réalité. Comme Dieu, qui a une réalité non spatiale, non temporelle et non matérielle. Et comme nos défunts. Il revient donc au Christ de donner des preuves après sa résurrection ; il est fils de Dieu, à lui les miracles et les preuves pour solidifier la foi, pour la « coller » à ses apôtres.
Mais, -et c’est le deuxième enseignement-, toute preuve qu’apporte le Christ à ses apôtres n’est pourtant pas suffisante pour donner la foi. Car la foi n’est pas de l’ordre de la démonstration ou de la logique. Elle ne vient pas par la preuve. Non, elle est une rencontre, une rencontre avec le Christ, comme l’expérimentent les apôtres dans l’évangile ; et une rencontre qui se fait, dans le don, et dans l’amour. Et c’est ainsi que le Christ, dans ce même évangile, après avoir pris quantité de poissons leur donne du pain. Donner, quel beau verbe ! Et peu après, il questionne Pierre, en lui demandant si il l‘aime. Et il faudra que la question lui soit posée trois fois, pour qu’il prenne conscience que la foi, c’est l’amour et le don de la personne.
Ainsi, le Christ va-t-il bâtir son Église sur celui qui l’avait renié trois fois. Et même si, dans l’histoire qui se déroule jusqu’à nos jours, certains de ses membres vont le renier encore et encore, l’épreuve de vérité devant la face du Christ qui demande l’amour et le don est inévitable. D’ailleurs, l’amour et le don dépassent ce que l’on peut attendre des normes établies dans ce monde pour ceux qui font autorité. Si Pierre est choisi par le Christ pour devenir le roc sur lequel celui-ci veut édifier son Église, ce n’est pas en raison de ses qualités d’organisateur, de visionnaire ou de tribun. Il est établi Berger des brebis parce qu’il est capable de répondre à Jésus, qu’il a pourtant trahi au moment de la passion : « …Tu sais bien Seigneur que je t’aime ». Là est le secret de la foi. Et au-delà de nos péchés, là est notre véritable force ; là est la sève qui nous nourrit.
Frères et sœurs, aujourd’hui comme il y a 2000 ans, le Christ nous propose l’amour et le don. Ne nous privons pas de les donner au monde. La foi n’est que jeunesse !
Thierry Merle Diacre