Rôle et place des chrétiens dans la vie politique » par François Boursier
10 février 2017
Texte et Photos Marie-Thérèse Ducurtil
Devant un auditoire d’une quarantaine de personnes très attentives, salle Notre Dame des Cités, François Bousier nous a présenté les réflexions de l’Église. Les évêques de France ont écrit une lettre à tous les chrétiens : Retrouver le sens du politique dans notre démocratie. Il nous a rappelé notre devoir et notre rôle de chrétien face au vote citoyen.
« Est-ce que les chrétiens doivent parler de politique ?
La politique divise, sépare souvent les gens ? Jusqu’à ces dernières années, l’Église ne voulait pas que les chrétiens se divisent. Les fidèles devaient s’occuper des œuvres sociales et non de la politique. 1ère prise de conscience par le Pape Léon XIII dans son encyclique « Rerum novarum » : Les chrétiens doivent s’occuper des problèmes de société et trouver des solutions.
En 1972, les évêques (dont Mgr Matagrin), font paraître un nouveau texte « pour une pratique chrétienne de la politique. L’Église invite alors les chrétiens à s’engager dans l’espace public.
Maintenant, les chrétiens sont de moins en moins nombreux dans nos sociétés sécularisées. Ils n’ont pas d’orientation politique particulière. Il est à noter qu’il y a très peu de gens qui se mêlent du débat ; or nous devons être convaincus de la nécessité de prendre sa part, en tant que chrétien, pour participer à l’amélioration du vivre ensemble.
En octobre 2016, nouvelle parution des évêques de France : « Dans un monde qui change, retrouver le sens du politique. »
Nous devons redonner au politique le sens qu’il doit avoir dans notre monde qui change et qui ne peut que préoccuper les chrétiens : nous vivons une révolution silencieuse qui bouleverse en profondeur notre monde qui devient de plus en plus global. On ne reviendra pas en arrière mais on peut le réguler car on a donné à la finance un pouvoir exorbitant. L’individualisme est poussé à l’excès depuis 40 ans. On constate une domination sans partage du néo-libéralisme (importance du business : nombre-calcul-coût). Le christianisme, bâti sur la naissance, l’histoire et la fin de chaque être, ne fait plus recette. Le passé n’inspire plus sauf dans les musées. Il y a polarisation du présent : tout – tout de suite- (Internet. Réseaux sociaux).
Nous sommes aussi dans une révolution anthropologique :
Il y a un vaste mouvement de déstabilisation de nos sociétés humaines. Idem de nos communautés chrétiennes. Le modèle paroissial est le modèle d’avant. Comment orchestrer un vrai vivre ensemble ?
Où le place-t-on ?
– dans ce monde bouleversé il y a des perdants et des gagnants
– il y a une montée des inégalités sociales qui casse les sociétés (on ne se voit plus)
– il y a une émergence d’ensembles de pauvreté
– il y a une insécurité grandissante La dignité humaine c’est la liberté et la sécurité
– il y a une immigration importante qui brasse les populations et qui déstabilise les fondements culturels de nos sociétés (laïcité).
Un grand débat se pose à nous : la révolution industrielle :
– Est-ce qu’on aura besoin de tout le monde ? Est-ce que tous, nous trouverons du travail ? Il faudra car le travail est fondateur pour chacun de nous ; Il nous permet de nous réaliser, de nous accomplir.
– En 30 ans il y a eu la création de 19 grandes aires métropolitaines qui drainent 45 % de la population et des emplois donc il y a fracture territoriale.
– Il y a une montée des populismes importante.
Il faut donc inviter les gens à débattre, à réfléchir : le défi va se situer dans le vivre ensemble.
Mais, comment construire de la justice sociale, de la solidarité ? : il nous faudra un supplément de diplomatie. Il faut débattre, voter et avoir confiance. Le problème rencontré : nous n’avons plus confiance dans la classe politique pour plusieurs raisons :
– la classe politique fonctionne comme une caste fermée
– les scandales sont nombreux
– nous avons le sentiment que le politique a perdu la main par rapport à l’économique.
Il est nécessaire de penser le développement humain intégral. La conception de la politique devient une foire d’empoigne permanente : on ne débat plus, on est ennemi. Nous sommes dans l’impossibilité de poser des compromis. Or faire de la politique c’est poser un problème, le prendre, en faire le tour en fonction de ses valeurs, proposer des solutions et aller vers une solution meilleure.
Nous devons avoir la culture de la négociation et du compromis.
Nous devons nous poser la question : quel est le sens du politique ? Qu’est-ce qui est le plus important pour le vivre ensemble ? Au nom de quelles valeurs ? notre foi ? le syndicat ?
Aujourd’hui nous n’avons plus rien ; nous sommes dans l’incapacité d’une continuité historique ; nous sommes surbookés. Il faut savoir mettre le monde à distance.
Le conseil permanent de la Conférence des évêques de France termine ainsi son document sur cette année électorale 2017 :
« Pour celles et ceux qui ont foi en Dieu et qui vivent dans la communion au Christ, les difficultés que nous rencontrons ne sont pas un appel au renoncement. Au contraire, elles nous acculent à investir toutes nos capacités pour construire une société plus juste et plus respectueuse de chacun. Cela s’appelle l’espérance »